Le film Witness, avec Harrison Ford, est pour la plupart d’entre nous une référence au sujet des Amish.
Si vous êtes passé à côté, cette communauté hors du temps doit vous sembler plutôt mystérieuse.
De quoi, de qui, parle-t-on exactement ?
D’une secte ? De babas cool sur le retour ?
Avec leur mode de vie en opposition totale avec le monde moderne, ils font au mieux office de marginaux évoluant dans une sphère très fermée, déconnectée de la réalité.
Eh bien moi j’affirme le contraire !
Il me semble que les Amish sont en réalité à la pointe de la modernité et pourraient même détenir le secret de la longévité tant convoité par les scientifiques.
Une mise au point
Pour couper court à tout cliché ou spéculation erronée, il me semble utile de revenir sur les origines de cette communauté.
S’ils sont bien connus et implantés aux États-Unis, les us et coutumes des Amish sont flous en Europe où on les confond fréquemment avec les Mormons.
Cette petite communauté traditionaliste est née du mouvement anabaptiste[1] suisse et implantée depuis le XVIIIe siècle en Pennsylvanie.
Elle compte environ 373 000 membres aux États-Unis, essentiellement répartis sur une grosse trentaine d’États, principalement la Pennsylvanie originelle, l’Ohio, le Michigan et le Wisconsin.
Depuis leur implantation, ils vivent toujours selon le même mode de vie se refusant à emprunter les voies toutes tracées par la modernité.
La technologie, très peu pour eux. Tout ce qu’ils ont hérité de leurs pionniers du XVIIIe siècle leur convient parfaitement.
Vous les verrez donc se déplacer en carriole, porter des vêtements désuets (habits sombres et chapeaux à larges bords), parler un incompréhensible dialecte suisse-allemand, et vivre de la ruralité la plus traditionnelle.
Outre leurs particularités sociétales, les Amish cachent une autre singularité : certains vivent en moyenne 10 ans de plus que les autres américains !
Les Amish détiennent-ils le secret de la jeunesse éternelle ?
Si une partie des Amish a une espérance de vie supérieure (85 ans en moyenne, contre 78 ans), il semblerait qu’elle le doit à ses gènes, et plus précisément à une mutation génétique unique.
C’est ce qu’a récemment révélé une étude menée par une équipe de chercheurs de l’université Northwestern de Chicago[2].
« C’est la première mutation génétique humaine qui se révèle avoir un impact multiple sur les changements biologiques résultant du vieillissement », explique le professeur Douglas Vaughan, président de la faculté de médecine Feinberg de l’université Northwestern à Chicago[3].
Selon lui, leur profil métabolique est plus sain que la moyenne, et les télomères de leurs cellules sont en moyenne 10% plus longs.
Les télomères sont comme des petits capuchons situés à l’extrémité de chaque chromosome pour le protéger.
Leur raccourcissement progressif naturel entraîne le vieillissement biologique qui se traduit par de nombreux troubles de santé.
Pour faire simple : plus les télomères sont longs et intègres, et plus l’espérance de vie en bonne santé augmente.
L’étude ne s’arrête pas là, car le professeur Vaughan compte bien s’appuyer sur cette découverte pour élaborer un traitement qui ralentirait la sénescence.
Des expérimentations ont d’ores et déjà été menées sur des souris et celles qui ont bénéficié du traitement ont été épargnées de toutes les pathologies liées à l’âge et ont vu leur durée de vie quadrupler !
Cette molécule antivieillissement représente donc un solide espoir de traiter ou de prévenir les maladies liées à l’âge.
La génétique n’explique pas tout
La génétique est souvent la solution de facilité pour expliquer les phénomènes que l’on ne comprend pas bien.
Bien entendu, les découvertes de l’équipe du professeur Vaughan sont très intéressantes et porteuses de grands espoirs, mais j’ai tendance à penser que la santé (bonne ou mauvaise) est dépendante de plusieurs facteurs qui s’additionnent au fil du temps.
On sait que les Amish se tiennent éloignés de la civilisation moderne qui constitue notre norme à tous.
Le mode de vie centré sur la consommation et la technologie est à des années-lumière de celui des Amish.
Ils vivent sans électricité ni technologie.
Ils construisent leurs maisons selon des méthodes anciennes, vivent en harmonie avec la nature, leur nourriture est issue de leurs cultures (bio, cela va sans dire), ils n’emploient pas de produits chimiques, ils sont moins exposés aux ondes et aux multiples pollutions, et ils ont un mode de vie qui favorise l’activité physique quotidienne.
Or, on sait très bien qu’une nourriture et un environnement sains, tout comme une activité physique conséquente sont les garants d’une bonne santé.
En ce sens, plusieurs études ont démontré que c’est bien le mode de vie des Amish qui leur permet d’avoir un système immunitaire plus performant que la moyenne[4].
Seuls 7% des enfants Amish souffrent d’allergies, contre plus d’un enfant sur deux ailleurs aux États-Unis !
Une différence que les scientifiques expliquent par une exposition microbienne variée et constante dès le plus jeune âge.
Une autre piste de réflexion me semble judicieuse : grâce à l’épigénétique, nous savons maintenant de façon certaine que l’environnement et l’hygiène de vie agissent sur l’expression de nos gènes.
Cette influence supplanterait même les effets programmés de notre patrimoine génétique (les gènes issus de nos parents).
Ainsi, si vous possédez un gène qui favorise l’apparition du diabète, votre mode de vie aura une action déterminante sur son action future et pourra vous préserver de cette pathologie.
Alors pourquoi ne pas envisager que le mode de vie des Amish puisse avoir favorisé la mutation génétique qui leur permet de bien vieillir ? Ce retour à la nature n’est-il pas ce à quoi nous aspirons tous ?